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Les formations initiées par le Parti communiste tout au long de son histoire correspondent-elles à une définition de l’éducation populaire, rejetant une « vision élitiste et descendante du savoir », et affirmant la nécessité de partir du « vécu » des militants pour les amener à construire eux-mêmes une analyse lucide de la situation politique ?

Alors que j’évoquais la formation au sein du PCF lors d’une réunion du parti, un camarade âgé me dit : « Pour moi, les écoles ce n’était pas de la formation, mais de la déformation. » Ce à quoi un autre camarade, plus jeune, put lui répondre : « Au moins vous avez connu des écoles au sein du PCF. » Cet échange en apparence anecdotique résume deux attitudes qui coïncident parfois chez les mêmes individus à l’égard de la question centrale qu’est la formation au sein du Parti communiste – présentée, dans les anciens statuts de 2016, comme un moyen de « démocratiser le PCF ».
Cause commune a déjà consacré quelques développements à cette question, notamment dans un numéro de 2018, et Jérémie Giono y mentionnait que les adhérents du PCF s’accordent à dire que la formation doit être une priorité. Dans le même numéro se trouve une définition très contemporaine de l’éducation populaire, entendue comme rejetant une « vision élitiste et descendante du savoir », et est affirmée la nécessité de partir du « vécu » des militants pour les amener à construire eux-mêmes une analyse lucide de la situation politique. Mais cette définition correspond-elle vraiment au travail mené par le Parti communiste tout au long de son histoire ?
Pour les coauteurs d’un article intitulé « L’éducation populaire » (Savoirs, 2016), dire qu’il n’y a pas d’accord sur une définition de ce terme est un lieu commun des chercheurs. Ils en proposent néanmoins deux acceptions : l’une se réfère à son usage administratif (ex. : l’agrément « Jeunesse et éducation populaire ») et l’autre, plus récente, autour d’une « nouvelle forme de rapport contestataire au politique qui passerait par la critique sociale mais sans recourir aux formes traditionnelles des luttes politiques » comme les partis. Si le PCF a pu frayer avec ces deux acceptions, nous verrons qu’il a développé un travail autonome d’éducation populaire sans toujours faire référence à ce syntagme, qui s’articule autour de la promotion de cadres issus des catégories dites « populaires ».

« Plus qu’un apprentissage “à partir” du vécu militant, les écoles servent à passer “de l’insu au su”, de l’impression diffuse à la conscience de classe. »

De fait, le terme ne semble apparaître que tardivement dans les publications du parti. Si on parle souvent d’« éducation politique », ou d’« éducation idéologique » dans les Cahiers du communisme, l’expression « éducation populaire » ne semble d’abord servir, et ce jusqu’aux années 1990, que pour des structures extérieures comme les « organisations sportives, de loisir, et d’éducation populaire » évoquées dans les mêmes cahiers en 1965. Est-ce que – pour autant – le PCF ne faisait pas d’éducation populaire ?
Se demander si, au cours de son histoire, le parti a vraiment valorisé les savoirs issus de l’expérience personnelle (le « vécu »), mobilisé les capacités critiques de ses militants, et d’abord insisté sur l’horizontalité de l’échange davantage que sur la verticalité propre à un modèle classique de transmission académique, revient peut-être à réduire l’éducation populaire à une définition rétrospective et pas toujours adaptée à l’étude des structures de formation du parti. Par « éducation populaire », nous pouvons nous entendre a minima sur le public cible : une formation politique qui s’adresse prioritairement aux milieux populaires (précisons par ailleurs que le faible nombre de travaux académiques sur la formation au sein du PCF est à l’origine de difficultés).

Des écoles au service de la bolchevisation du Parti
Dans sa thèse soutenue en 1977 (et publiée en 1980) sous le titre Les Premiers Communistes français, l’historienne Danielle Tartakowsky indique que la propagande de la vieille SFIO était liée au capital personnel de ses cadres, souvent intellectuels (avocats, journalistes, enseignants, etc.), et que le parti ne s’était jamais vraiment préoccupé de former lui-même ses propres dirigeants (en 1919, Marcel Cachin compte encore sur les étudiants socialistes pour éduquer les masses). Danielle Tartakowsky appelle cela les « illusions pédagogiques » : croire qu’on va réussir à promouvoir des éléments issus des classes populaires seulement en leur transmettant un savoir universitaire extérieur à leurs pratiques militantes.
Les débuts du jeune parti communiste sont encore marqués par de telles illusions : au sein de la SFIC, l’école communiste-marxiste de Charles Rappoport est animée par des intellectuels, et elle fonctionne sur le modèle des universités populaires socialistes qui avaient souvent des étudiants pour public. L’Internationale communiste fondée en 1919 est très sceptique quant à la possibilité de ces écoles de former des cadres ouvriers, elle essaye d’orienter l’idéologie véhiculée avant de s’attaquer aux structures d’enseignement.

« Les débuts du jeune parti communiste sont marqués par des “illusions pédagogiques” : croire qu’on va réussir à promouvoir des éléments issus des classes populaires seulement en leur transmettant un savoir universitaire extérieur à leurs pratiques militantes. »

Charles Rappoport est accusé de diffuser un marxisme « décomposé, réduit, comme aplani sur sa composante française qu’est la lutte de classes et son histoire ». Dans son école, la coupure semble totale entre « éducateurs » et « éduqués ». La SFIC continue donc la SFIO en se présentant comme l’« éducatrice des masses », mais les masses ouvrières restent alors à l’écart de cette organisation – le lieu privilégié du travail militant étant prioritairement le syndicat.
Malgré une première rupture lors du 3e Congrès de l’Internationale (1921), c’est la bolchevisation – dans le contexte des luttes d’influences au sein du Parti communiste d’Union soviétique et de l’Internationale – qui accompagne la transformation pédagogique du Parti communiste français. Pour lutter contre les oppositions intérieures et extérieures, le Komintern crée en 1924 une section d’agitation et de propagande afin d’éduquer le parti en tant qu’être collectif, et non plus d’abord l’individu qui en est membre. On cherche à accélérer « l’homogénéisation idéologique » et, en novembre 1924, s’ouvre la première école centrale du PCF à Bobigny presqu’en même temps que sont créés les Cahiers du bolchevisme. Cette école doit former des cadres ouvriers, et l’Internationale choisit le communiste allemand Alfred Kurella pour diriger le « travail d’éducation » en France.
Alfred Kurella cherche à homogénéiser les cadres autour de la « théorie marxiste-léniniste », il publie des fascicules, mais surtout il tâche de faire le lien entre le contenu pédagogique et la pratique professionnelle à l’usine. Les soixante premiers élèves (dont quarante-sept ouvriers, parmi lesquels Jacques Duclos ou Fernand Grenier) doivent être éduqués par l’approfondissement de leur expérience militante. Pour Alfred Kurella, la théorie doit venir ensuite. Le résultat de ce cadre inductif est assez mitigé : Alfred Kurella néglige le niveau préalable de culture générale, ce qui le conduit à sous-estimer les difficultés d’assimilation.

« L’éduc’ pop a pu apparaître comme l’horizon politique de cadres communistes de moins en moins issus des classes populaires, détenant par eux-mêmes un savoir légitime tandis que leur soutien à l’éducation populaire compense leur éloignement objectif des classes subalternes. »

S’agit-il d’éducation populaire au sens contemporain ? L’horizontalité est réduite, puisque le contenu même des cours est fabriqué par la direction communiste (bien que des échanges de pratiques militantes peuvent avoir lieu). La substitution de ces « écoles centrales » aux précédentes « écoles du propagandiste » est à l’origine du cursus pédagogique au sein du PCF qui existe jusque dans les années 1990 (écoles élémentaires au niveau des sections, écoles fédérales, écoles centrales d’un ou quatre mois). Mais quel que soit le terme utilisé, un des acquis très clairs de cette période est de légitimer un personnel politique d’extraction populaire par la promotion interne de militants ouvriers. Rappelons enfin que la formation ne se fait que partiellement dans les écoles : les prisons – par lesquelles passent de nombreux dirigeants dans les années 1920-1930 – sont également un important lieu de socialisation politique et de partage des connaissances.

Politiser les masses populaires : une pratique par le haut
Le modèle des écoles centrales se prolonge et gagne en complexité à partir du moment où le PCF dispose de moyens financiers plus importants grâce à ses succès électoraux. À partir des années 1950, tous les secrétaires de section doivent théoriquement être passés par les écoles fédérales de quinze jours (leur promotion incombe alors à la section des cadres du comité central).
Une brochure de 1947 intitulée « PCF juin 1945-juin 1947, du congrès de Paris au congrès de Strasbourg » rappelle qu’en 1946 se sont tenues neuf écoles centrales, qu’il existe des écoles spécialisées par branche (pour les organisations « amies », de paysans, de femmes, de jeunes...), qu’en un an, quatre mille cinq cents communistes auraient suivi les écoles fédérales, et que de multiples écoles « de base » donnent des « cours élémentaires » aux nouvelles recrues. Éducation populaire ? Plutôt système scolaire parallèle. Les cours sont descendants, animés par des enseignants souvent brillants (Jean Bruhat, normalien et agrégé d’histoire…), parfois décevants (d’où les souvenirs contrastés...).
Nathalie Ethuin a analysé un certain nombre d’autobiographies de communistes ayant suivi les écoles du parti dans les années 1970-1980. Ce qui revient est la « mise en sens du vécu ». Plus qu’un apprentissage « à partir » du vécu militant, les écoles servent à passer « de l’insu au su », de l’impression diffuse à la conscience de classe. Tous les témoignages qu’elle cite dans son article de 2003 (« De l’idéologisation de l’engagement communiste. Fragments d’une enquête sur les écoles du PCF [1970-1990] » Politix) évoquent l’enthousiasme à l’idée d’acquérir des « certitudes ». L’un des témoins explique : « Des certitudes qui sans doute maintenant me gêneraient pour réfléchir, mais qui à l’époque nous rendaient un peu plus clairvoyants. »
C’est un objectif assumé par la direction, davantage encore en 1985 (lors de l’inauguration du centre de Draveil qui doit héberger les écoles centrales du parti), lorsque Georges Marchais insiste sur la connaissance de « certitudes issues du patrimoine historique et idéologique du mouvement ouvrier » (dans un contexte tout à fait particulier de l’histoire du parti – l’échec aux élections européennes de 1984 ouvrant une période de « reprise en main » des structures de formation par la direction nationale). Mais ce patrimoine intellectuel est bien envisagé comme extérieur à l’expérience militante et il doit donc faire l’objet d’un apprentissage classique.
Le recrutement de militants parmi les populations les plus éloignées du cadre universitaire reste une priorité des écoles, et le parti tâche de leur donner une grille de pensée permettant de politiser leurs conditions de vie. Cette activité de formation accompagne une surreprésentation ouvrière dans les cadres et effectifs militants jusqu’à la fin des années 1970. Le modèle fonctionne.
Comme dans les années 1920, ces écoles servent à repérer les militants ouvriers les plus valables pour en faire des permanents. Ainsi, Jean Caron – tourneur-ajusteur chez Alsthom – commence par une école fédérale de quinze jours grâce à un congé sans solde. Remarqué, il devient permanent en 1965 puis suit une école de quatre mois à Viroflay (le centre de Draveil n’est pas encore ouvert). Jean Burles, ouvrier ajusteur, est le dirigeant de l’école centrale de quatre mois de 1968 à 1971 et propose à Jean Caron de rédiger des brochures pour les écoles fédérales.
On le voit, il ne s’agit pas d’horizontalité, mais de repérer à l’intérieur des classes populaires les éléments les plus remarquables pour les élever au sein du parti. Ce ne sont pas les savoirs professionnels de Jean Caron qui sont à l’origine de son ascension au sein du PCF, mais ses formidables capacités militantes et intellectuelles (les cours de philosophie de Jean Caron ont durablement marqué ceux qui y ont assisté…). En retour, cela contribue à un certain éloignement du milieu d’origine, dont beaucoup d’anciens élèves sont conscients bien que la remise de leur éducation au parti ait joué un rôle surtout perçu comme positif.

De l’école du Parti au stage de formation (depuis les années 1990)
Nathalie Ethuin constate, dans sa thèse soutenue en 2003, qu’à partir des années 1990, la formation au PCF est dans la quasi-impossibilité de « redonner un sens commun à l’engagement communiste ». On abandonne le cursus hiérarchisé – la dernière école de quatre mois à Draveil a lieu en 1994 – et, en 1998, a lieu le dernier stage de dix jours, dans un contexte de tarissement des effectifs participants.
Mais cette évolution est en germe dès les années 1980 : Francette Lazard, responsable du secteur Éducation du comité central de 1979 à 1985 propose de privilégier les stages de « formation permanente » ; le « cursus » des écoles centrales apparaît comme prioritairement centré sur les cadres du parti au détriment de l’éducation politique de tous les adhérents.
Alors responsable à la formation, Marie-George Buffet propose en 1994 de « dépasser la notion de cursus dans nos écoles pour se rapprocher de l’idée de formation permanente ». Dès le 28e congrès, on préfère parler de « formation » plutôt que d’« éducation ». En 1996, le terme « école centrale » est repoussé pour sortir d’un « lieu où l’on vient chercher des connaissances » (entretien avec Marie-George Buffet, Le Monde, 22 décembre 1996).

« Les écoles élémentaires, fédérales, centrales d’un ou quatre mois ont légitimé un personnel politique d’extraction populaire par la promotion interne de militants ouvriers. »

Après l’élection présidentielle de 2002 – terrible pour les finances du parti –, le centre de Draveil est mis en vente. Dès lors, ce sont les fédérations qui organisent des « stages ». Relativisons l’opposition « écoles /stages » : dans les écoles du parti, un exposé par un « sachant » précède une discussion, ce qui est toujours la forme classique des stages. Mais ce remplacement des écoles par des « stages courts » a une conséquence directe : comme le rappellent Nicolas Bué et Nathalie Ethuin en 2005, « le PCF n’échappe plus aux mécanismes de sélection scolaire ». Les communistes les mieux dotés en capital scolaire entrent en concurrence avec des camarades moins formés académiquement (un camarade me disait : « Dans les années 2000, ceux formés à l’école bourgeoise nous formaient » – signe d’une rupture avec la période antérieure quand Jean Caron, ouvrier à ses débuts, pouvait enseigner à des communistes diplômés de l’enseignement supérieur).
Signe des temps, Claude Gindin, délégué à la formation au début des années 2000, explique à Nathalie Ethuin que la formation ne peut plus être une opération de « discipline institutionnelle » : l’idée est de pousser les camarades à être eux-mêmes contributeurs « sans donner la position du parti car ils peuvent la trouver ailleurs »… En 2018, dans Cause commune, Jean-Louis Frostin expliquait encore : « Il ne faut pas attendre que tout descende d’en haut. » Mais au-delà des intentions affichées, la formation reste d’abord l’œuvre d’intervenants-cadres du parti ou extérieurs, dans une conception assez verticale de la transmission de connaissances.

Éducation populaire et désouvriérisation du Parti
Si le PCF a mis au cœur de son projet politique l’ascension des masses populaires par la formation, en permettant à des cadres ouvriers de prendre des responsabilités de plus en plus importantes, cela ne s’est pas fait d’abord par une formation horizontale mais par la mise en place d’une structure scolaire verticale, efficace, et concurrente du système scolaire académique.
De plus, le PCF ne s’est mis à se référer clairement au terme « éducation populaire » qu’au moment de sa désouvriérisation, de la fermeture progressive de ses écoles et de difficultés financières plus importantes nécessitant la refonte de son système de formation.
« L’éduc’ pop’ » a donc pu apparaître comme l’horizon politique de cadres communistes de moins en moins issus des classes populaires, détenant par eux-mêmes un savoir légitime (diplômes de l’enseignement supérieur, prédominance des métiers du social, de la culture, de l’éducation...), tandis que leur soutien à l’éducation populaire compense leur éloignement objectif des classes subalternes.
Au-delà d’un syntagme positivement connoté à gauche, se référer à « l’éduc’ pop’ » peut donc être aussi vu comme un aveu d’impuissance, le « cache-sexe » de difficultés plus globales (tensions internes au sein de la direction et des milieux intellectuels du parti dans les années 2000, difficulté à articuler un plan global de formation, léthargie de la production théorique…), mais qu’il est possible de surmonter par un investissement réel dans la formation, et par le dépassement de l’opposition parfois simpliste entre « écoles du parti » et « éducation populaire ».

Hoël Le Moal est historien. Il est membre du comité de rédaction de Cause commune.



Une culture nouvelle pour la société

Extrait du programme de l’Unité populaire pour la campagne qui permit l’élection de Salvador Allende. Le programme de l’Unité populaire a été approuvé par les partis de gauche le 17 décembre 1969, huit mois et demi avant l’élection du 4 septembre 1970.

Le processus social qui s’ouvre avec le triomphe du peuple élaborera progressivement une nouvelle culture qui tendra à considérer le travail humain comme la plus haute valeur, à exprimer la volonté d’affirmation et d’indépendance nationales et à élaborer une vision critique de la réalité.
Les profondes réformes qui seront entreprises demandent que le peuple soit socialement conscient et solidaire, éduqué pour exercer et défendre son pouvoir politique, apte scientifiquement et techniquement à développer l’économie de passage au socialisme et ouvert massivement à la création et à la jouissance des manifestations les plus variées de l’art et de l’intelligence.
Si aujourd’hui déjà, la majorité des intellectuels et des artistes luttent contre les déformations culturelles propres à la société capitaliste et essaient de porter les fruits de leur création aux travailleurs et de s’associer à leur rôle historique, ils auront, dans la société nouvelle, une place d’avant-garde pour continuer leur action. Parce que la culture nouvelle ne se créera pas par décret, elle surgira de la lutte pour la fraternité contre l’individualisme ; pour la valorisation du travail humain contre le mépris dont il est l’objet ; pour les valeurs nationales contre la colonisation culturelle ; pour l’accès des masses populaires à l’art, la littérature et les moyens de leur communication, contre leur commercialisation.
Le nouvel État recherchera l’incorporation des masses à l’activité intellectuelle et artistique, tant à travers un système d’éducation radicalement transformé qu’à travers l’établissement d’une organisation nationale de culture populaire. Un vaste réseau de centres locaux de culture populaire favorisera l’organisation des masses qui exerceront ainsi leur droit à la culture.
L’organisation de culture populaire stimulera la création artistique et littéraire et multipliera les possibilités de contact entre artistes ou écrivains et un public infiniment plus vaste que le public actuel
(in Fournial, G., Acquaviva, A., Gilhodes, P. & Marcelin, J. [1974]. Chili : trois ans d’Unité populaire. Paris : Éditions sociales).

Cause commune36 • novembre/décembre 2023